01/12/2010

Qu'est-ce qui nous fait rêver ?

Un post de Brice sur le rêve, il ne m'en fallait pas plus pour m'emporter...
J'entends trop souvent dans les réunions marketing "naaaan mais ça, ça fait pas rêver". Argument massue, serial killer d'idées créatives. Faut-il faire rêver les consommateurs ? Est-ce vraiment ce qu'ils attendent des marques ? Est-ce le rôle de la créativité en ce monde ?

Brice se désespère de la pub : "Les marques ont essayé (et essaient encore) de nous faire rêver mais Culture Pub c’est bien fini, et nous sommes lassés d’être réduits à l’état de « cibles » définies à partir de 5 critères seulement. Pour rappel : l’âge, le sexe, le lieu d’habitation, la profession du chef de famille et le niveau de revenu." Triste constat de la part d'un professionnel, mais aussi d'un consommateur exigeant.

D'abord, y-a t'il eu une époque bénie où la communication était plus créative, plus fun ? Ensuite, les marques ont-elles cessé de nous faire rêver ? Oui, sans doute, et tant mieux. Après avoir beaucoup entraîné les consommateurs vers des univers "aspirationnels" loin de leur quotidien, le marketing (qui suit et renforce des tendances sociologiques profondes) revient à la réalité des gens, à leur quotidien, leur corps, leur maison, leur famille, leur planète. N'est-il pas temps de faire face à la réalité et à nos responsabilités envers elle ? Entre crise financière et dangers écologiques, le temps de rêver la consommation est peut être fini. Les consommateurs sont davantage en demande de réassurance, de faits, de certification. L'aterrissage est rude mais ce n'est pas un arrêt brutal ! La consommation est autant un marché de rêves qu'un marché de solutions, il ne faut pas l'oublier. De plus en plus informés, de plus en plus exigeants, les consommateurs font aussi des arbitrages rationnels. Les marques sont donc tenues de les informer au mieux et de se mettre à leur service (c'est la brand utility).

Brice se désespère : "En fait, les rêves préfabriqués du porno ou de l’industrie agro-alimentaire sont dérisoires, et brûlent dans notre imaginaire comme la paille dans l’âtre : sans y laisser de braises." C'est certain, ces rêves sont indigestes et parfois néfastes pour la santé physique et mentale des individus. Mais qui a pu croire que les rêves distribués par les médias de masse et la consommation allaient construire du sens pour chaque individu ? Et plus encore, construire les fondements solides d'une société ? Les imaginaires sociaux sont aussi normatifs que nourriciers. Portés par les marques et les médias, ils sont une source pour chacun d'entre nous, un élément de culture. Mais ils sont aussi les vecteurs de pressions normatives fortes. Ce sont des rêves en boîte, il ne faut pas les manger tels quels mais les utiliser pour créer notre tambouille personnelle... Ce qui nécessite de l'éducation et de l'interaction sociale, choses qui ne sont pas données à tout le monde.

1 commentaires:

Brice a dit…

Je trouve ta perspective et ta réflexion sur la partie "marketing" de mon post très intéressantes et ton article m'a donné de quoi réfléchir ! Sans doute l'atterrissage brutal que tu évoques ( même s'il ne signifie pas que les marques aient renoncé à nous faire rêver... ) peut-il être rapproché du désinvestissement de la politique. Chacun reviend à son rôle, avec un peu moins de lyrisme mais aussi, en retour, un peu plus de crédibilité. Au fond, donner envie c'est déjà beaucoup pour le marketing, dont le rôle premier était d'intervenir auprès des usines pour les interpeler sur les besoins des consommateurs. Il faut avoir visité un pays communiste avant la chute du mur de Berlin pour avoir une idée de l'univers surréaliste d'une économie sans marketing, ou seul le plan d'état fixe la production...

Un autre point qui me fait réfléchir est ton analogie culinaire. Si le marketing offre des rêves en boite, alors qu'est-ce qu'un ingrédient du terroir ? Pouvons-nous cueillir, chasser, puiser, découvrir par nous mêmes de nouveaux ingrédients de la saveur de nos vies ? Il est intéressant de ce point de vue que ce ne soient plus les publicitaires qui mènent la ronde des tendances sociales et les consommateurs qui suivent, mais de plus en plus l'inverse : les blogs, les twitts, les forums d'opinions sont analysés nuit et jour pour comprendre et suivre les tendances, à défaut de les avoir impulsées. C'est l'heure du doute chez les "créas" qui sont moins nos créa-teurs que nos créa-tures ces derniers temps...

Tant mieux, car ce goût dans nos bouches aprés avoir goûté les rêves du terroir, c'est celui de la liberté et il fait du bien ! ;)

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